Mastic, culture
Exploitation de lentisques dans le sud de l'île, Chios, mars 2019. On remarque que le sol est nettoyé sous chaque pied : on balaie avec soin le dessous de ces arbres.
" Il faut donc conserver et provigner [=marcotter] les pieds donc le suc nourricier s’épanche abondamment par les incisions : c’est pour cette raison que les Lentisques ne sont pas alignés dans les champs, mais qu’ils naissent par gros pelotons ou bosquets écartés les uns des autres. L’entretien de ces arbres ne demande aucun soin : il n’y a qu’à les bien choisir et les faire multiplier en couchant dans terre les jeunes tiges. On émonde quelquefois les Lentisques dans la lune d’Octobre, ou pour mieux dire on décharge leurs troncs des nouveaux jets qui empêcheraient les incisions ; du reste on ne laboure guère la terre où sont ces arbres parce que l’expérience a fait connaître aux gens du pays que pour avoir beaucoup de mastic, il ne fallait que provigner ceux qui en produisent beaucoup.
Peut-être que si on incisait les Lentisques en Candie, dans les îles de l’Archipel et même en Provence, en trouverait-on quelques-uns qui répandraient autant de mastic que ceux de Scio ! Combien voit-on de Pins dans les mêmes forêts qui ne donnent presque pas de résine, quoiqu’ils soient de la même espèce que ceux qui en donnent beaucoup : la structure des racines plus ou moins serrées peut être la cause de ces variétés.
On commence les incisions de Lentisque dans l’île de Scio le 1er jour du mois d’août, coupant en travers et en plusieurs endroit l’écorce des troncs avec de gros couteaux sans toucher aux jeunes branches ; dès le lendemain de ces incisions, on voit distiller le suc nourricier par petites larmes dont se forment peu à peu les grains de mastic ; ils se durcissent sur la terre, et composent souvent des plaques assez grosses, c’est pour cela qu’on balaie avec soin le dessous de ces arbres. Le fort de la récolte est vers la mi-août, pourvu que le temps soit sec et serein : si la pluie détrempe la terre, elle enveloppe toutes ces larmes, et c’est autant de perdu. Telle est la première récolte du mastic.
Vers la fin de septembre les mêmes incisions fournissent encore un peu de mastic, mais en moindre quantité : on passe le mastic au sas pour en séparer les ordures, mais la poussière qui en sort s’attache si fort au visage de ceux qui y travaillent, qu’ils sont obligés de se laver le visage avec de l’huile. " TOURNEFORT 1717.
Incisions sur un tronc de lentisques, Chios, mars 2019.
Pyrgi, un des "villages du mastic", Chios, mars 2019.